
Ci-dessous la déclaration de la diaspora congolaise du Canada face aux troubles sanglants dans le Grand Bandundu
Nous, membres de la diaspora congolaise du Canada, constatons avec amertume et indignation la persistance de l’insécurité et des conflits dits tribaux dans une partie des provinces deMai-Ndombe, de Kwango et de Kwilu, à l’Ouest de Kinshasa, et faisons la présente déclaration.
Des faits
Des vastes parties des provinces deMai-Ndombe, de Kwango et de Kwilu sont en proie aux violences opposant les communautés Teke et Yaka depuis mai – juin 2022. D’après le Cardinal Ambongo, le conflit est beaucoup plus complexe et implique plusieurs groupes ethniques de la RD Congo : « il y a des Bangala, des Batetela, des Baluba, des Bambala, des Bayanzi. Même si les Yaka sont majoritaires, dans cette contrée, ce n’est pas un conflit ethnique, c’est un conflit autour de la gestion des fermes et des plantations que les autres ont achetées aux Tekeou qu’ils sont en train de louer aux Teke ».
Des affrontements auraient donc débuté à la suite de la majoration des redevances coutumières, mais aussi par rapport « à la question » de terres, et donc de propriété foncière.
Depuis plus de huit mois, une détérioration généralisée de la situation sécuritaire, humanitaire et sociale touche ces trois provinces avec des conséquences désastreuses. Étonnamment, cette situation perdure malgré le déploiement des forces de l’ordre et de sécurité sur terrain.
Les conséquences de cette situation déplorable
Des habitants sont massacrés, des populations désertent leurs villages et cités et se cachent en forêt, en brousse ou dans la savane boisée pour échapper à des massacres, des enlèvements ou déplacements forcés et des pillages perpétrés par des assaillants, ou pour se protéger contre des exactions et abus des militaires ou policiers censés pourtant les protéger.
En plus de l’errance dans des brousses et forêts, l’insécurité dans de vastes zones en proie à la violence a entraîné une surpopulation de certaines villes, cités et villages, l’abandon forcé de l’agriculture, la malnutrition, la non scolarisation des enfants et une situation humanitaire désastreuse doublée des maladies endémiques.
Sur le plan de la coexistence, des rapports et témoignages font état des tensions entre populations (Le mot ethnie a été mis de côté à la dernière réunion au profit du terme population.) impliquant des hommes et femmes politiques en mal de positionnements et de postes.
Tenant compte du fait que, cette situation perdure malgré le déploiement des forces de l’ordre et de sécurité sur terrain, la diaspora congolaise du Canada juge donc inefficaces, voire complices, toutes les démarches entreprises jusqu’à présent, visant à rétablir la paix dans lesdites zones du Grand Bandundu depuis le début des conflits. Voilà pourquoi, une fois de plus, elle vient joindre sa voix à celle de nombreux patriotes soucieux de leur pays.
Appel aux différents intervenants
La Diaspora congolaise du Canada lance un vibrant appel afin de mettre immédiatement fin aux massacres, tueries, déplacement des populations et à la situation humanitaire désastreuse qui frappe les populations entassées dans des camps de refuge.
– Au Président de la République, nous demandons de prendre toutes les mesures efficaces pour rétablir la paix, la sécurité et la sérénité dans les régions en proie à des violences entretenues notamment par des personnalités politiques originaires de ces régions ;
– Aux ministres des ministères en charge des affaires foncières et de l’intérieur, à la suite du cardinal Ambongo nous demandons « de bien expliciter ou clarifier la notion de « chef de terre » mais aussi des redevances coutumières et de la propriété en rapport avec l’autorité traditionnelle ; »
– À la communauté Internationale, à des organisations caritatives, humanitaires et à tous ceux qui pourraient contribuer à rendre justice aux populations victimes d’injustices, d’extorsions et de spoliations, de ne pas faire montre d’une attitude hypocrite et ambiguë ;
– Aux autorités militaires et policières, d’imposer la paix, et de sécuriser la population et d’empêcher les militaires de participer eux aussi aux tueries et pillages des populations déjà démunies ;
– Aux responsables de la justice, de rechercher et de traduire toutes les personnes qui ont joué quelque rôle dans la naissance ou qui entretiennent ce conflit ;
– Aux autorités administratives dans des zones concernées, de faciliter la pacification des régions en proie aux violences, notamment en sensibilisant les belligérants et les jeunes à se désolidariser de toutes pratiques de violence et d’activation artificielle des conflits entre les différentes populations ;
– Aux politiciens, de cesser immédiatement l’exploitation de la haine et des divisions tribales comme mode d’accès ou de conservation du pouvoir ou comme positionnement politique ;
– Aux jeunes des régions visées par les violences et à la Société civile, de dénoncer les personnalités politiques et autres acteurs qui manipulent la population et attisent les conflits ;
– À la Société civile, d’aider et d’assister la population meurtrie par une assistance humanitaire répondant à leurs besoins vitaux ;
– Au monde universitaire et de la recherche, de contribuer à la recherche des solutions pour une paix durable dans les régions concernées ;
– Aux autorités ecclésiastiques et religieuses locales, de contribuer à sensibiliser la population pour un retour à la coexistence pacifique et pérenne des peuples de la région ;
– À la diaspora congolaise et aux opérateurs économiques, de se préparer à la reprise économique dans des zones sous conflits.
Fait à Ottawa, le 10 février 2023.
Pour la Diaspora congolaise au Canada, les représentants :
Olard Azangi
Mavula Kikwe
Jean-Luc Ndombe
Armand Kayolo
Faustin Musambi