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Au Royaume-Uni, le troisième anniversaire du Brexit a été célébré hier, mercredi 31 janvier, sans grande conviction, sur fond de crise sociale et de doutes sur les bénéfices de la sortie de l’Union européenne. Pour l’économie, le bilan est globalement négatif.
Le Premier ministre Rishi Sunak a beau jeu de souligner dans un tweet « l’immense opportunité économique du Brexit ». Ses concitoyens ressentent plutôt un immense gâchis. Ils sont aujourd’hui appauvris par une inflation à 10% et protestent depuis des mois pour obtenir des augmentations de salaires. Ce mercredi, les fonctionnaires sont en grève, cela devrait être la plus suivie des dix dernières années. Les difficultés du pays, l’inflation, l’envolée des prix de l’énergie sont directement liées aux conséquences de la guerre russe en Ukraine. Mais à l’aune des comparaisons internationales, on réalise que le Royaume-Uni s’en sort moins bien que les pays équivalents soumis aux mêmes aléas. Depuis 2020, son économie se traîne, comme lestée par l’encombrant héritage de ce choix politique.
C’est le seul pays développé qui n’a pas encore retrouvé le niveau de PIB d’avant la pandémie
Et son avenir proche n’est pas très rassurant. Selon les dernières prévisions du FMI publiées hier, le Royaume-Uni sera aussi le seul membre du club des pays riches qui devrait connaître une récession cette année. Ce décalage persistant avec les autres pays avancés se retrouve à tous les étages de l’économie. La croissance, le commerce extérieur et l’investissement progressent moins vite qu’ailleurs. Le Brexit n’est pas la cause unique de ce déphasage, mais il a rendu le pays plus fragile, moins résilient face aux crises.
Le rebond du commerce extérieur était l’une des promesses des « Brexiters »
Les accords commerciaux alléchants post-Brexit n’ont pas encore permis d’atteindre cet objectif. Parce qu’ils ne sont pas forcément meilleurs que les précédents. Ils ne font bien souvent que reprendre les clauses prévues au niveau de l’UE. Et parce que les deux plus grandes nations commerçantes sont absentes des négociations. Les États-Unis n’en veulent pas et la lune de miel entre Londres et Pékin appartient au passé. Le Global Britain est resté à l’état de chimère. Enfin, le Brexit a eu des effets négatifs sur le commerce avec l’Union européenne, qui demeure le premier partenaire commercial du royaume. La paperasse et les frais engendrés par le retour des contrôles aux frontières ont fait bondir la facture des importations en provenance des 27 et ont découragé les PME britanniques orientées vers le continent.
Le marché de l’emploi est aussi l’un des grands perdants du Brexit
Quelque 330 000 emplois auraient été détruits, faute de candidats, d’après l’étude d’un think tank londonien pro-européen. Car les travailleurs étrangers en provenance de l’Europe communautaire ne bénéficient plus du même accès au marché britannique. Les nouveaux accords migratoires sont stricts, d’où les pénuries actuelles de main-d’œuvre dans le transport, le commerce et les métiers du soin, des secteurs où les postulants européens étaient indispensables avant 2020.
Peut-on chiffrer les pertes liées à la sortie de l’Union européenne ?
Le manque à gagner serait de 100 milliards de livres par an, soit 115 milliards d’euros de revenus perdus chaque année depuis trois ans. C’est l’estimation des économistes de l’agence Bloomberg. D’après leurs calculs, le PIB britannique aurait gagné 4% de plus si le non l’avait emporté au référendum de 2016. L’Office pour la responsabilité budgétaire, un organe indépendant chargé de surveiller les finances publiques, parvient à la même estimation. Enfin, dans la colonne des pertes sèches, il faut ajouter les 40 milliards de livres de taxes perdues chaque année par le fisc britannique.