
À l’approche des échéances électorales de 2023, la carte politique se redessine. C’est déjà l’heure de grandes manœuvres politiques, avec des alliances qui se font et se défont. La première qui se déclare est celle constituée d’Augustin Matata, Martin Fayulu Madidi et docteur Denis Mukwege, tous potentiels challengers de l’actuel président de la République, Félix-Antoine Tshisekedi, à la magistrature suprême. Tous se sont déclarés candidats président, à l’exception de Denis Mukwege qui attend que le peuple se détermine et prenne son destin en mains, avant d’accepter cette responsabilité.
Mais d’ores et déjà, l’opinion retient que dans une déclaration commune faite, lundi 26 décembre 2022, Augustin Matata Ponyo, Martin Fayulu et Denis Mukwege font savoir qu’aucune forfaiture électorale ne passera en 2023 et la mobilisation du peuple sera “totale” pour sauver la République démocratique du Congo qui est, selon eux, en danger.
Cependant, au regard du temps qui nous sépare de l’échéance de décembre 2023, nombre de ces exigences paraissent contradictoires par rapport à la volonté de tenir les élections dans les délais constitutionnels. Aujourd’hui, exiger la recomposition “immédiate” de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), c’est ramer à contrecourant de la dynamique nationale, quand on sait que l’équipe Kadima a déroulé le chronogramme des opérations électorales ; au nombre de celles-ci les opérations d’identification et enrôlement des électeurs lancées depuis samedi 24 décembre dans sa première aire opérationnelle, regroupant les zones géographiques de l’Ouest du pays dont la ville de Kinshasa.
Aussi, revenir sur la recomposition du bureau de la CENI, c’est ressusciter les vieilles querelles sur les sexes des anges, qui roule pour qui, qui est proche de qui. La communauté nationale a frais dans la mémoire combien cette question a failli mettre la nation à feu et à sang, avec des composantes de la plateforme « Confessions religieuses », malgré la bonne foi du président de l’Assemblée nationale qui avait accordé délai de grâce sur délai de grâce à ces voix discordantes pour tenter d’arracher le difficile consensus autour du candidat président de l’institution citoyenne.
La nouvelle équipe à mettre en place voudra imprimer sa touche au processus électoral. On risque d’assister à un recommencement, ce qui veut clairement que nous nous mettrons en retard par rapport aux délais constitutionnels.
De même, rouvrir le débat sur la loi électorale au niveau de l’Assemblée nationale, c’est chercher à retarder la machine électorale qui prend déjà de la vitesse. On sait que le Parlement est en vacances depuis le 15 décembre 2022. Il ne rouvre ses portes qu’en mars 2023. Or, mars nous situe à environ 9 mois de la date fatidique du 23 décembre 2023.
À la Cour constitutionnelle, le mécanisme de remplacement des juges constitutionnels est régulé par la loi. Par quelle magie va-t-on désigner d’autres hauts magistrats alors que ceux qui sont en place y sont encore en plein mandat ?
Quelque chose et son contraire
En prenant une telle position, l’opinion s’interroge : Matata, Fayulu et Mukwege mesurent-ils la conséquence et les implications d’une telle exigence ? En même temps, ils affirment, « pas une seule minute de glissement ne sera accordée au pouvoir de l’Union sacrée de la nation ». Comment peuvent-ils vouloir une chose et son contraire ? À moins que le trio nous dise qu’ils veulent engager la nation sur la voie d’un glissement, sans avoir le courage de prononcer le mot.
Par ailleurs, pour un processus électoral inclusif, apaisé, crédible et impartial, ces personnalités exigent la levée de l’état de siège dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri ; la recomposition “immédiate” de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) ; la recomposition “urgente” de la Cour constitutionnelle, le consensus autour de la loi électorale, des centres d’inscription et du calendrier électoral ; l’arrêt de l’instrumentalisation de la justice et des services fiscaux contre les candidats déclarés ou les potentiels candidats président de la République ; l’arrêt des poursuites judiciaires contre le sénateur Matata Ponyo et le respect de la Constitution sur les libertés d’expression, d’opinion, de manifestation publique et de réunion.
En même temps, ils sollicitent de la communauté internationale, de l’Union européenne et de l’Union africaine l’envoi urgent des experts des Nations unies pour procéder au monitorage du processus électoral, déjà avec les opérations préélectorales lancées, notamment l’identification et enrôlement des électeurs dans la première aire opérationnelle de la Commission électorale nationale indépendante (CENI).
« Il n’est jamais trop tard, dit-on ! Aussi, à cette étape essentielle du processus électoral, nous sollicitons auprès de la communauté internationale, l’envoi urgent des experts des Nations unies, de l’Union européenne et de l’Union africaine, pour procéder au monitoring tel que mené à ce jour », demandent Matata, Fayulu et Dr Mukwege.
Par rapport au dossier M23, les 3 personnalités exigent la condamnation “ferme” du Rwanda, par le Conseil de sécurité des Nations unies et par tous les pays épris de paix et de justice pour « cet acte d’agression contre la RDC, en violation de la Charte de l’ONU », mais aussi le retrait “immédiat” de ce mouvement terroriste du territoire congolais.